Je me souviens...
Je me souviens de Gabriel Claverie et le quart perrier de la victoire sur les étapes du Tour de France.
Je me souviens de mes premiers Miroir du Cyclisme en 76 et les déboulés imparables du roi Freddy Maertens ou de Zoetemek et Delisle en 77 en couverture.
Je me souviens de la révélation du roublard Jan Raas à San Rémo.
Je me souviens de l’entrée majestueuse dans le gotha d’un certain Bernard Hinault à Liège…du crépuscule brillant du dieu Eddy Merckx la même saison…celle ou deux jeunots de chez Flandria prenaient les deux premières places du championnat de France…et de Didi Thurau en jaune à Bordeaux sur le chrono du lac.
Je me souviens du maillot irisé maculé de boue de Francesco Moser sur le vélodrome de Roubaix…de Michel Polentier montré du doigt.
Je me souviens de Henk Lubberding arborant pour la première fois une combinaison uni-pièce les cheveux au vent dans le chrono de Saint Emilion, une évolution qui mettait en valeur le corps de l’athlète…mais surtout du mieux.
Je me souviens de Giovani Battaglin dans un maillot à pois au chrono de Super Bagnières, deux ans avant son super doublé Vuelta/Giro.
Je me souviens de Thévenet redevenant coureur en maillot Téka et Maertens en maillot San Giacomo qui commençait son retour pour redevenir se grand sprinter…de Raymond Martin s’en allant toucher un bout du ciel dans Peyresourde.
Je me souviens de la cote de Domency et du visage ravageur du Blaireau.
Je me souviens de Duclos Lassale qui déchausse sur le Vélodrome de Règis Clère en maillot amarillo…de Levavasseur aussi en 79 et de Patrick Bonnet en rose.
Je me souviens de Philippe Martinez, Jean Francois Chaurin, Eric Dal’Armelina, Jean Pierre Guernion, Gérard Kerbrat ,Jean François Rodriguez…les kermesses…Jan Bogaert.
Je me souviens des soviétiques Averin, Soukhoroutchenkov, Barinov, Morozov…les colnagos rouges…le tour des régions Italiennes, les hommes en gris… de Grégor Mount et de Andy Hampsten et des premiers Ricains.
Je me souviens de l’A.C.B.B. et de sa colonie anglophone…Jones, Millard, Peiper, Anderson, Roche… le grand prix de France contre la montre.
Je me souviens des marques…Colombus, Reynolds, Vitus, C.L.B. ,Gally, 3TTT , Huret…les maillot de soie…le super prestige Pernod.
Et puis un jour Bernard Tapis…et puis…mondialisation, classement UCI…vinrent les tours Banesto, le world tour, les tours de nulle part, grand prix de n’importe ou, dopage à l’artillerie lourde, anti dopage intégriste inquisiteur, trains de sprinters, disparition de courses légendaires, multiplications des stages, coureurs derrières les grilles, dans des bus forteresses, médecins, entraineurs, directeurs de performance…vélo à 15000 tout électrifiés, coursiers mercenaires se sacrifiant au plus offrant…disparition de l’ambition sportive au profit de la conscience professionnelle. Et puis…les pistards tombés dans l’anonymat et au profil d’haltérophile.
Le cyclisme est mort en 1992 avec l’arrivée de l’EPO.
Alors il parait que c’est mal de regarder dans le rétro, qu’il faut vivre avec son temps et s’en contenter, voire s’en réjouir…
Je me souviens que le vélo était une école de la vie.
Je me souviens que le vélo m’a fait les yeux doux encore ses derniers mois, je lui ai répondu…comme à chaque fois…nous avons des tendresses…mais nous ne couchons plus ensemble.
Je me souviens… d’un CYCLISME.
Je me souviens d’à peu près tout le cyclisme que j’ai vu…j’ai cultivé la passion jusqu’à me souvenir de tout le cyclisme qui a précédé mon existence. Mais depuis quelques saisons, je ne me souviens plus des années, les classements, les vainqueurs…ça ne me laisse plus de traces.
Je me souviens que j’ai bientôt soixante balais…
« Plus ne sais ce que j’ai été
Et plus ne saurait jamais l’être
Mon beau printemps et mon été
Ont fait le saut par la fenêtre. »
Et puis il y a eu ce beau podium sur les championnats du monde de Glasgow…2023
…Alors peut-être
WINNIE
